PAUL EMILE QUIGNAUX

samedi 27 mars 2010

C'est fini, qui vivra verra...


C'est fini pour ce premier blog. J'avais une soixantaine de textes sous la main. Ils sont là avec des illustrations en contrepoint. J'ai encore un texte datant du passé , le plus long, le plus énigmatique et le plus fragmenté. Son titre est "librellules". Il est trop long pour être publié ici. Il faut que je trouve une solution audio pour ces textes. Malgré leur apparente dérive et pour certains leur incohérence, ils sont lisibles à voix haute. Une mélopée en émane. Elle a quelque chose d'un jazz impro, d'un jazz à mots provoquant des éclats d'images. Au tout début, il y a longtemps, il s'agissait d'une recherche personnelle, d'une confrontation avec le vain de l'écrit. Ces textes étaient alors bruts, saillants, plein du jeu de leurs sonorités désaccordées. Je les ai assagis. ls ont été émoussés pour ne pas trop couper. Il y aura une V.2 faisant suite à cette V.1 sur laquelle je reviendrais pour la trafiquer encore un peu, pour le plaisir de la manipuler encore, pour saler, poivrer, pimenter, remettre du bruit, du discontinu, de l'embrouille. Qui vivra verra !

samedi 20 mars 2010

Fragments d'interview sur mes vols d'Edo



Question : Votre souvenir le plus fort ?

Réponse : A l’aplomb de shinjuku est passée une caravane de très jeunes aborigènes nus et une cohorte de moines tibétains auréolés d’arc-en-ciel, assis en tailleurs, couverts de manteaux safrans, tous concentrés sur une longe trajectoire qui devait être millénaire. Long plané léger pour les traverser. Je me souviens de l’odeur de neige et de parfums sucrés, de sable et d’étable quand je les ai croisés…

Q : Des trépassés ?

R : Sans doute, mais je n’y ai rencontré aucun de mes morts, que des sourires évanescents, indifférents à notre présence. Par contre, beaucoup d’oiseaux de nuit surpris de me voir si haut, dans mon âme, sorti sans ailes de mon corps. Non, aucune sensation mortifère. Là-haut, la finitude est incongrue, déplacée, presque risible. Il en est de même pour l'idée d'éternité. C'est incompréhensible. D'ailleurs, en vol, de ça, je crois qu'on s'en fout !

Q : Vos amis de vols ?

R : On se devinait au loin sans pouvoir jamais s’approcher. Par exemple, je savais Myasaki en suspension au dessus de Shibuya, Goran de Kichiyogi et Thierry suivant l’invisible Sumida. Aucun de nous ne contrôlait totalement son vol. Des aimants semblaient nous guider. Planeurs de nuits, nous suivions leurs champs de force et seulement parfois nous pouvions passer de l’un à l’autre. Curieusement, sans nous voir, nous nous ressentions. Cela nous procurait une confiance absolue…

Q : Tokyo de là haut ?

R : Nous l'appelions Edo, c'est-à-dire de l'ancien nom de Tokyo mais ça n’a pas d’importance. Nous planions seulement au dessus de ses villages. C’était surtout un ailleurs d’odeurs, d’images et de vibrations. Une caresse du temps et de l’espace recourbé sur nous, des senteurs amazoniennes mêlées aux gaz carbonique de Londres, des fraîcheurs d’iceberg colorées de blés mûrs surchauffés par le soleil, des embruns atlantiques déposés dans les Oueds du Désert de Libye. Là haut nous n’avions qu’une certitude, nous percevions qu’en bas la terre tremblait sans cesse. Des ondes multiples et infimes, permanentes et vibrionantes.

Q : Comment décolliez-vous ?

R : Pour partir, il ne fallait que se regarder et sur la natte s’endormir un à un. Un air très sec était nécessaire pour s’échapper de nos carcasses. Le corps astral comme les chats déteste l’eau. On se détachait sans angoisse, sans nervosité, sans même le savoir. Les aimants venaient nous prendre délicatement, nous accueillaient aimablement et avec une sorte de ferveur attentive dans leurs rondes atomiques. Aucune tension en haut, pas d’émotions, pas de désirs. Là haut, nous étions des amybes célestes, des cellules sensorielles, des corps sans matière, des particules, des atomes personnifiés…

Q : Vous voliez souvent ?

R :Je vous l’ai dit uniquement par temps très sec. Cela limite beaucoup. Moi j’ai volé trois fois sur mes sept séjours à Edo. Thierry, Goran, Myasaki et Kichiyogi qui y vivaient volaient trois à quatre fois par an…

Q : Mais, c’est impossible de vous croire …

R : Nous ne demandons pas à être crus. Certains savent et d’autres pas. Cela nous était offert et nous ne savions pas pourquoi …

Q : Donnez une preuve ?

R : Aucune n’est possible. Ah si il en existe une. Une vieille prostitué de Yoshiwara. Repoussés dans nos corps par une force douce et imparable, nous sortions de nos désincarnations terriblement affamés. Cette vieille prostituée au visage de momie était insomniaque et tenait une sorte de micro-épicerie éclairée par une lanterne. Nous nous y précipitions. Elle nous accueillait d’un grand éclat de rire, sortait une sorte de purée blanche très sucrée à base de racines dont nous baffions comme des porcs. Elle riait de plus belle à nous voir et nous servait ensuite une sorte de soupe de navets marronnasse, du thé et enfin de la bière. On ne lui parlait pas. Elle était la complice de nos vols. Elle vit toujours. Je suis passé la voir lors de mon dernier voyage. Malgré les trente ans passés, elle m’a reconnu et m’a simplement dit narquoise: « tu passes cette nuit ? ». J'ai éclaté de rire et l'ai embrassée. Ses joues ont rosi telle une adolescente.


Brochette de cachalots


Alors, vous voyez, vous prenez une grosse tringle à rideau et puis vous y allez. Un cachalot , un chamalow , un cachalot, un chamalow, un cachalot, un chamalow, vous les enfilez, les uns à la suite des autres, comme pour une brochette. Faite attention, les cachalots peuvent être encore humides et, si vous ne vous essuyez pas les mains après chaque cachalot vos doigts vont coller aux chamalow. Une demi-douzaine de chaque que vous saupoudrez de safran et nappez ensuite de milkshake fraise. Vous cachecolez le tout dans une grande lamelle de feuille de bananier et vous mettez au micro-onde le temps que les cachalots ne frétillent plus. Ensuite, vous grillez au chalumeau le dos des cachalots et chaque face des chamalow. Vous dégusterez avec un chablis que vous aurez portez à ébullition pendant la cuisson et refroidi violemment par une eau gazeuse énergisante glacée juste avant de servir. Un filet d'huile d'arachide voire mieux de foie de morue sur chaque tringle garnie pour finir. Bon appétit…

Pamanteries...


Les mères vieilles mentent et leur fiel m'hante. Les mères veillent leurs merveilles que les pères cher payent. L'amant s'éveille au sans-pareil et va les sentes humant la menthe qu'amère la mère sent. Dans le repaire des pères qui n'osent l'impair se terre encore la mère qui se plante amer en mer jusqu'à l'infini de leur vie. Parmi les repères des mères se pointe aussi l'impaire, la différence séparant le même, l'inconcevable amante qui s'alimente du désir d'un nouveau temps tailleur tentateur. Il y a aussi l'amer mâle de la pleine mère, reflet du pair femme, de l'en-terre dit père. En fait peu d'océan nique la mer et les pamans mentent. Au nom du Père, les non-dupes errent, disait Lacan et pour les fils saint d'esprit, c'est encore pire…

dimanche 7 mars 2010

Lesbiennes sérieux !





Patachou vient dans le cou de Marilou qui hurle au loup son émotion zoulou, ses gilili en dessous, ses rires partout pas tout, sa mine à mous d'amour qui nous fait dire hé, et nous, et nous ? Dans les averses de leurs bras doux, dans l'abri de leur nid de coucou, dans le cou, dans le cou de Marilou qu'aime fort sa Patachou.

Garde à vue


Que t-ont-ils calciné sous leur projo ? Ta cité taciturne, ta turne surpeuplée, ton vieux aphasique, ta zique débridée, ton scoot rapté, ta mère et tes sœurs pré-burkées ? Lève ta tête mon frère, tu vas pas supporter ça ! T'ont mis à nu, les cons ? T'ont fait pleurer ces fions ? T'ont tordu le cœur en serpillière et pissé dessus ? Tu pues pas ! T'es ragé ou t'es plié ? T'es honteux ou malheureux ? Tu trouves pas les mots, c'est ça ? Respire, expire sinon il empire en toi leur empire. Tu suceras toujours les pis d'leur peur aux pires heures, tu resteras beur, beurre à tartines et lave-latrine. Ils ne savent pas ce qu'ils font, ni qui ils sont. Ils sont des âmes errantes dans des arcanes noires, des pigeons croisés aux rats et aux corbeaux, des enfants sans enfance, des blindés de conscience, des verrues de vertus crues, des petits élus déçus, des manques-à-vivre et à aimer, des dessoudeurs de dignité qui ne récoltent que ce qu'ils sèment. Toi, toi, t'es plus beau, bien beau que ça car t' as que seize ans mon gars ! Sèche tes larmes...

Laisse-cargo


Scargo, laisse cargo, cargo serpent. Un Liberty ship avec un élastique au cul accroché à Ellis Island. Visquant vicieux vers l’S de l’Est. Coquille de noix sur l’océan limace de mes neurones qui bavouillent secs. Escargot ! Pourquoi pas colle et hop en terre ! Je pense à Colette enfant qui pleura en apprenant qu’un presbytère n’était pas un papillon. Porte mémoire sur corps rampant, porte leurre et porte pleurs. Cargo, car go, go go ! Petit gogo des laisses qui sifflent sous nos têtes. Vieux Liberty Ship englué dans la confiture de mers mourantes, asphyxiées, plastifiées. Molle loque de mollusque. Les mots sont lourds ce soir. J’ai un S marin, un S voguant, une limace sous iceberg gluant vers les cieux dans les plis laiteux de la serre veau lente de ma carnego…

Guantananaries



Une île fortifiée au large hors d’une couverture de jute. Sac orange, un corps se dérêve. L’œil plane sur la décharge du monde, s’enfonce à mi-course dans sa base vase. La poitrine s’ouvre autrement qu’à l’habitude. La respiration y grimpe comme un ver tortillant vers la gorge, au dessus des narines palpite et la bouche halète au carreau des cercles d’humidité. Des cercles ! En bas, tracés de peinture autour d’hommes debouts, nus toute la nuit dans la cour, des photos de putes autour du cou. Mal de crâne. Ceinture à clous prise aux tempes. Cuir chevelu crépu, pellicules d’égouts. L’odeur des visages marchands de phrases et de grammaires aboyantes. Un seul pas vers la cuve d’alu où ils sont venus criés. Le ciel défile bleu et rouge étoilé puis de plein d'autres drapories. Ils parlent même plus. Y verser le premier café. Leur mains jointes sur la timbale par le judas tout juste grand. Pas trop de sucre. Dire de les raser. Partir en lentes brassées vers le fond du jour, vers un Droit replié pour des siècles effondrés.

Myopathe terminal

Appuyée à sa cornée, une attente démesurée, sertie aussi dans les gercures de sa main qui empire, gonfle et transpire quand elle parvient à son regard. Entre temps, laborieux, il stationne, tourne en carré, rond, ou losange. Qu’importe! Minutieux au bruit qui dans sa poitrine respire et empire aussi les feulements de son souffle, les battements intérieurs qui canalisent la crainte. Battance depuis l’éveil et de plus loin encore.Sur sa lèvre supérieure, des traînées jaunes qu’on ne mouche plus. Sa marche dans les pièges des toiles aux froides découleurs. Un lieu arianisé sentant fort ce qu’il laisse au bas de son fauteuil, son territoire renard éponge, sa pisse de frontières improbables. Pleut même plus de l’eau tout contre ses portes étroites que de la neige fondue. Aucun sourire crétin. Il s’affaisse sans gravité. Il tombe le dos sans mur par millimètres pendant des heures immobile dans le ciel guettant sa béance. Tu peux lui prendre la main. C’est de la pâte à papier du chiffon-os broyé fracturé menu, sans veine, à peine d’ongles. L’attente sans craquement. Grégory vieillira juste un peu ainsi, encore quelques jours.