PAUL EMILE QUIGNAUX

samedi 28 février 2009

Déserticulée


Et ce monde pendant mon absence ? Comment sévit-on actes, hommes et femmes ? Charrie-t-on toujours les touts-petits ? Parles-moi de là-bas qui ne veut s’effacer. Des nuques rasées, des os en poudre, de ceux qui savent, du chant des herbes sous le couperet, de ton ombre, toi dans la rue quand tu passes ? Il faut que je te dise. Je fus réveillé la première nuit, dans la grande salle de leur musée. Un mur de graffitis et de photos. Un titre : filet de bave et surfil de sang. Un autre : commissure d’un garrotté. Des pièces d’encéphalogrammes. Et le bruit, la noria des souffles. Tu courrais dans les genêts et nous étions haïs. T'en souviens-tu ? Ce jour-là, les verbeux furent déposés à l’aube sur le quai des églises, dans toutes nos vallées. Mes mains devinrent froides. Seul le cri du violon hésita puis chuta du trait plein à la plainte. Il y avait dans le champs face à ma lucarne: des corbeaux très très noirs, des Azraëls en rut brisant les mottes gelées à coups de bec secs furieux. Des vers-couteau requis à l’air. Orgue désaccordé d’une cathédrale sans toit. Des enfants la tête en terre et les pieds dans les nuages. Tes seins ont du vieillir. Le temps goutte des larmes d'ombre, ourlaize la peau, anémie les yeux. Eux, voient-ils une chienne sur le dos en plein soleil qu’ils décochent leurs pieds rageurs et dans les côtes de la bête , s’acharnent… Nos caresses étaient lentes, pélerines, ruisselantes de saveurs de fromages et de vins. Le pain sec insistant sous nos fesses, le lit habité de jours entiers, d’infusions, de fureur, de sommeil et de rêves. Tes mains ! Encore étonnée ? Par la montée de mes doigts en marée timide dans le gouffre que joints en corolle tu formais de tes paumes ?
Un jour dans ma cellule, ils firent entrer une fille, rasée elle aussi. Elle ne parlait plus. Ses yeux n’étaient qu’orbites. Puit insoutenable. J’ai pris sa main, l’ai léchée comme un chien a faim. Noyant mon visage dans ses empreintes, grattant son sol de ma langue. Chaque trace dévoilaient des sources à sa surface puis des villages, une odeur de pipe et de raisin. L’intérieur était la terre fertile. L’extérieur les mers. Et entre ses landes doigts, des voies lactées. De ses lèvres a perlé un soleil et de ses cils, venu de très loin un ruisseau, un ruisseau en attente d’eau. Dans sa main la joie usée d’une vie brûlée. Ses doigts rougissaient. Ils me l’ont arrachée. Des injures. Puis, elle, elle, déserticulée, dans l’encadrement de la porte.
La suite, tu la connais jusqu’ici. Infirme de tout cela. Tu comprends, hein dis moi ?

Fragments du discours d'une inconnue pour le 100 ème anniversaire de la mort de Lacan


........« Hé, hé, que voulez vous ? Il y a des caresses qui nourrissent le phallus saigneur. Suivez bien les contours foulés et refoulés, les qui sentent à plein nez. Evitez les tessons de bouteilles, les cannettes de bière percutées, les landaus césarisés, tous les écueils qui vont joncher notre propos, cet amer intérieur vers lequel nous faisons voile.
Rappelez vous…, souvenez vous de ce truc, cette chose, cette physique à cent, à milles plaques, toutes noires venues, du très haut, de cette métaphysique céleste,
d’un hermaphrodite, hermétique, d’un immonde sans monde, sans ying qui fait bang, sans yang qui fait big.
La fécondité, disais-je, est plus que lacérée, dégonflée, en lambeaux. Son procès révèle notre nudité sans sexe, sans maux. La terre était donc limbe, à poil, imberbe. L’esprit de Dieu errait sur les eaux,
planait, planait, à tutti quanti, à quelle vitesse ? disait l’ami Janké. C’est l’essentiel, l’essence du ciel !
Admettons pour la démonstration qu’à l’époque l’ombre n’allait pas plus vite que la lumière. Le divin planeur a du perdre de la vitesse et se faire prendre au piège de la gravité. Lui aurait pas tombé dessus, l’aurait pas forniquée. La lumière aurait continué son chemin, n’aurait pas fondue. Donc à quelques poussières moins vite que les photons, il planait sec mais pas assez et ce grand con a chu, chu dramatiquement. Et depuis ça c’est charpenté la dessus…
Maintenant, le mal joli luit plus sur la peau des ventres qui s’en-chaleurent à vide que sur les eaux placentaires et autres flaques. Il découple à mort et c’est bien ainsi. Ce n’est pas plus terrible que l’orthodoxie sans pléthore, sans folie, surproduisant des faits à la raison mal cuite qui mâchent nos vies comme des enfants du papier pour faire des papas et des mamans
à unique petit con… Donc, c’est là, lorsque déraillent les vagues-on de la pensée majoritaire, quand l’aube dissout les montres du temps des sexes, quand le brownien jouit et se pourlèche du pipi-peur des organisations, du relâchement des dignitaires, que se rouvre la scie castrice. Et de la plaie éructent les barbelés puis in fine les blanches armes à découper les découplés, les in-produits de la chair-terre. Face à l’angoisse d’un tout qui se re-nude, les jeunesses aux écrans-miroirs, devant nous tous, se mettent à claquer les verrous. Commence alors la montée non pas des eaux redevenues limpides mais celle des gaz, vous m’entendez, des gaz… Non pas moutarde, pas orange non plus, sans doute du type ébola. Et oui, très gros bobo là, virus dans la couille pensante niché aussi à l’uterus roundupisé , monsantisé, monstrantisé. Hé, hé mes petits beaux-beaux ! ».............